En matière d’expressions typiquement charentaises, vous avez peut-être déjà entendu parler de la cagouille (l’escargot), la since (la serpillière), l’embauche et la débauche (le début et la fin de la journée de travail) ou encore le ramasse-bourre – on entend aussi parfois ramasse-bourrier – (la pelle pour les ordures ménagères). Mais connaissez-vous celles-ci, moins connues peut-être, mais tout aussi locales ?

Demandez à Google traduction ce qu’il comprend si vous lui dites :

« J’étais dans le jardin à cueillir des brins d’aillet et un peu d’appétit quand il s’est mis à tomber un bouillard ! Ouhla, j’ai tout garoché dans la palisse, pis j’ai fait rentrer les drôles dans la souillarde ! »

Alors ? Lost in translation ? On vous traduit :

L’aillet. C’est la jeune pousse d’ail, dont on consomme les fins brins verts qui sortent de terre avec le printemps en les hachant menu. On déguste en Charente de très bonnes omelettes aux brins d’aillets.

L’appétit. L’appétit vient partout en mangeant, certes, mais en Charente Maritime, il désigne en outre la ciboulette. Eh oui !

Un bouillard. Ah ! ce climat océanique… Si vous avez de la chance, vous n’aurez à subir que de la mouillasse, une petite pluie fine communément appelée la bruine, mais si vraiment la pluie tombe drue, là, on vous parlera en Aunis comme en Saintonge, d’un bon bouillard. Et il vaut mieux ne pas être en-dessous.

Garocher. Garocher, c’est jeter, lancer loin de soi.

La palisse. Avec ses faux airs de palissade, la palisse est en effet une haie vive, celle qu’il faut tailler au printemps.

Les drôles. Et les drôlesses. Pas besoin qu’ils vous fassent rire ou qu’ils aient de l’humour. Les drôles et drôlesses, ce sont les enfants, garçons et filles. Et un bon drôle, c’est « un bon gars ».
La souillarde. C’est l’arrière-cuisine. Idéal pour égoutter les drôles trempés par le bouillard.

Et encore ça :
« C’était la maline. On a badé tout le tantôt sur la conche à regarder les pêcheurs de boucs, on a même ramassé une pleine poche de jambes. Le soir, on les a mangées sur le continent avec des sans-sels, on a même fait chabrot. Fi’ de garce ! ça m’a caillé sur le jabot ! »

Traduction :
La maline. La grande marée. C’est également le nom d’un centre culturel sur l’île de Ré et ce n’est sans doute pas un hasard.

Bader. Eh bien, c’est simple : les badauds badent, c’est-à-dire qu’ils restent à ne rien faire…

Le tantôt. Partout ailleurs, tantôt veut dire plus tard. Mais en Charente, ça veut dire en plus « l’après-midi ».

La conche. L’anse, la baie. Les belles plages de la région sont souvent appelées des conches.

Les boucs. Rien à voir avec la chèvre, enfin pas ici. Le bouc est une petite crevette grise.

La poche. Qui n’a pas entendu ça à la superette : « Je peux avoir une poche s’il vous plaît ? – Vous voulez dire un sac ? »

Les jambes. Moins facile. La jambe, c’est ce gastéropode qu’on ramasse à marée basse, que les biologistes appellent la patelle et les enfants des « chapeaux chinois ».

Le continent. Aucun pont ne suffira jamais pour que les Rétais et les Oléronnais ne désignent la bande de terre qui leur fait face autrement que par « le continent ».

Des sans-sels. Hmmm… les bonnes sans-sels vendues à la criée. Il s’agit de petites sardines, consommées crues.

Faire chabrot. Une façon comme une autre de finir sa soupe, en lui ajoutant une bonne rasade de vin rouge et en la buvant à même l’assiette.

Fi’ de garce ! ça m’a caillé sur le jabot. Sur cette interjection sympathique, nous conclurons en disant que nous avons eu bien du mal à digérer tout ça.