L’île de Ré, “rocher” appartenant au département de la Charente-Maritime, regorge d’un patrimoine culturel d’exception à découvrir. Lorsque l’on évoque l’île de Ré, nous pensons d’abord au phare des Baleines, repère maritime symbolique de l’île ; ou à ses marais salants à perte de vue, installations spécifiques ayant façonné son paysage. Cependant, à Saint-Martin-de-Ré, centre historique de l’île, on bichonne la mascotte locale : l’âne en culotte. Connu aujourd’hui dans tout le Poitou-Charentes sous le nom de baudet du Poitou, cet animal emblématique rhétais participe au développement de la vie insulaire depuis trois siècles. Venez contempler ces équidés atypiques qui contestent l’étiquette « bête comme un âne » qu’on leur glisse. Peut-être aurez-vous le courage d’en monter un !
À quand remonte la tradition des ânes en culotte de l’île de Ré ?
Un animal culotté qui fait la fierté de Saint-Martin-de-Ré
Les ânes en culotte firent leur première apparition sur l’île de Ré à la seconde moitié du XIXe siècle. Ils arrivèrent par bateau afin de remplacer les chevaux déjà en poste. Animaux robustes et puissants, leurs nombreuses qualités dont le calme et la sérénité en firent des atouts de choix. Dans une région maritime bercée par les activités viticoles et salicoles, les baudets firent rapidement partie intégrante de la vie quotidienne des Rhétais. En effet, ils étaient prédisposés à accompagner le travail des locaux dans de nombreuses tâches soit pour les aider, soit pour les remplacer, car elles étaient jugées trop physiques pour l’homme. Les ânes en culotte étaient alors affectés aux travaux agricoles dans les exploitations, souvent dirigés par les Rhétaises au ramassage du varech – plus communément appelé « algues » – sur les côtes de l’île, à la récolte du sel et aux transports d’un village à l’autre.
Les changements d’habitudes avec l’arrivée des machines
Cependant, dès la toute fin du XIXe et au début du XXe siècles, les activités agricoles déclinèrent. C’est alors que la population rhétaise s’est peu à peu détachée de l’utilité des ânes. De ce fait, cette espèce robuste et puissante, faisant partie du paysage de l’île de Ré, faillit disparaître totalement. Mais à quoi doit-on ce changement de mode de vie ? C’est au XIXe siècle, celui de la révolution industrielle ayant débuté en Grande-Bretagne pour s’étendre, ensuite, sur tout l’ensemble du monde par la voie navigable, que de nouveaux outils firent leur apparition. L’essor de l’industrialisation impacta donc fortement les méthodes de travail locales. Les animaux laissèrent place aux machines. Malgré leur coût d’achat, la rentabilité de ces rouages métalliques n’était pas négligeable pour la population. Par ailleurs, les tâches fastidieuses s’effectuaient plus facilement et rapidement qu’avec l’aide d’un âne.
Des ânes culottés, d’où vient cet accoutrement ?
Effectivement, lorsque l’on voit ces ânes, l’on s’interroge sur l’utilité de cette culotte si étonnante ! Sachez qu’ils ne la portent pas pour le plaisir ou pour charmer leurs semblables, bien que les habits de ces ânes soient colorés. Le rôle de cette culotte est de protéger les baudets des différentes attaques extérieures. En effet, alors qu’ils évoluaient dans les marais salants ou dans les vignes, il n’était pas rare qu’une invasion d’insectes ou que des branches épineuses agressent la partie fine de leurs jambes. Autrefois, leurs maîtres utilisaient des bouts de tissus provenant de pièces abîmées afin d’en faire des culottes de fortune.
Véritable emblème local, l’âne en culotte anime l’économie de l’île
Alors qu’ils avaient quasiment disparu du territoire de l’île de Ré durant la période d’industrialisation et d’innovation, les baudets du Poitou furent sauvés par des passionnés. Aujourd’hui, les ânes en culotte font partie d’un élevage qui les préserve et garantit leur descendance, leur permettant de reprendre possession de ce bout de terre rhétais. En revanche, ne les cherchez pas dans les exploitations agricoles ou dans les vastes marais salants de l’île de Ré ! Désormais, les baudets du Poitou participent à l’économie touristique de Saint-Martin-de-Ré. Authentique mascotte locale, vous retrouverez l’âne en porte-clefs ou en peluche dans les magasins de presse, les boutiques de souvenirs, ou dans les savonneries avec le savon au lait d’ânesse.
Le plus intéressant reste néanmoins de les voir en vrai, et pourquoi pas de faire monter vos enfants sur leur dos. Cela est possible dans le parc de La Barbette, situé entre le port de Saint-Martin-de-Ré et sa citadelle fortifiée. Vous pourrez contempler les baudets du Poitou vêtus de leur culotte d’apparat. Ne leur en voulez pas si, lors de votre balade, ils font une petite pause, car ne dit-on pas d’eux qu’ils sont « têtus » ? Pour clore cette excursion au côté d’un emblème de la faune rhétaise, rien de plus agréable que d’aller les admirer dans leur environnement naturel, au cœur des remparts de la ville. Installez-vous un petit instant devant ces bêtes aux poils longs, imprégnez-vous de la sérénité et du calme olympien qui en font leurs caractéristiques.
