La ville portuaire de La Rochelle inscrit en gros plan son patrimoine médiéval notamment grâce aux étonnantes tours de défense qui la composent, incroyables monuments fortifiés. Édifiées pour défendre la ville depuis le xive siècle, elles sont les véritables gardiennes du port. Aujourd’hui ouvertes au public, elles constituent des points de vue exceptionnels sur le port et ses environs ainsi que des sites culturels riches.

 

La tour Saint-Nicolas, spot emblématique du triptyque

 

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La tour Saint-Nicolas est la marque significative de La Rochelle avec son Vieux-Port. Édifiée il y a de cela sept siècles, après la libération de la domination anglaise, en 1376, elle avait pour fonction première de protéger le port ; notamment grâce à son implantation à l’entrée même de celui-ci, tournée vers la mer. Son nom vient d’ailleurs du patron des gens de la mer, Saint-Nicolas. Faisant face à sa sœur, la tour de la Chaîne, une chaîne fut tirée entre les deux tours afin d’interdire le passage vers ce fameux port. La construction de l’ensemble des trois tours de défense de la cité médiévale de La Rochelle commence avec la première pierre posée sur les fondements de la tour Saint-Nicolas au xive siècle. Cette tour, authentique « donjon seigneurial », symbolisait la puissance de La Rochelle au Moyen Âge. Elle remplissait parfaitement sa fonction militaire en faisant office de dépôt d’armes et de prison aux xvie et xviie siècles. La tour fut réaménagée au xviie siècle afin de répondre aux besoins militaires du moment. Plus tard, elle fut confiée au ministère des Beaux-Arts et classée monument historique en 1879, permettant ainsi sa conservation et les restaurations qui suivirent aux xixe et xxe siècles.

Du haut de ses 36 m, la tour Saint-Nicolas abrite sur quatre niveaux des escaliers et des couloirs menant aux nombreuses salles faites de charpentes ou de voûtes. Elle est également munie d’une petite chapelle gothique, de chambres et antichambres, de cheminées et de latrines enchantant les propriétaires qui y séjournaient au xive siècle. Les fondements de la tour furent cependant bâtis sur un sol marécageux, ce qui stoppa sa construction à plusieurs reprises. En 2019, le lieu a été fermé au public par sécurité afin d’effectuer des réparations d’urgence, car des fissures avaient été détectées au pied de la structure. Aujourd’hui, on peut encore voir la tour pencher vers l’est. Sa hauteur en fait un site célèbre internationalement. C’est un des spots européens renommés choisi lors du championnat du monde de plongeon, le Redbull Cliff Diving. Nichés à 27 m, des plongeurs du monde entier se confrontent chaque année lors de cette compétition exceptionnelle.

 

La tour de la Chaîne, un poste de contrôle stratégique

 

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Suivant la danse de la tour Saint-Nicolas, la tour de la Chaîne sortit de terre à la toute fin du xive siècle. Autrefois, cette tour était divisée en deux parties. La petite tour de la Chaîne, qui était le point d’ancrage de la chaîne tendue reliée à la tour Saint-Nicolas, permettait de bloquer le passage des navires la nuit vers le port de La Rochelle. Cette première tour n’existe plus aujourd’hui, elle fut détruite au xixe siècle pour agrandir l’entrée du port. Et la grosse tour de la Chaîne hébergeait le capitaine de la tour, toute sa famille et ses biens. Le capitaine pouvait être différent chaque année, car il était nommé annuellement par le maire. Son rôle était de surveiller les allées et venues à l’entrée du Vieux-Port, d’installer la chaîne pour la nuit ainsi que de collecter les taxes et droit de passage des navires. La tour reçut la visite du roi Louis XI en 1472 qui fut émerveillé par la richesse de la ville de La Rochelle, un mythe raconte qu’il grava quelques mots à ce propos sur l’une des fenêtres, nostalgique de son ancienne possession léguée à son frère.

Tout comme sa voisine d’en face, la tour de la Chaîne a été édifiée pour défendre la ville militairement. Elle fut elle aussi une prison ainsi qu’un dépôt d’armes et de butins. De plus, elle servit de poudrière lors du soulèvement contre la monarchie du roi Louis XIV au xviie siècle. Cette dernière attribution fit exploser la tour et laissa un trou béant dans son toit qui resta ainsi pendant trois siècles. Cette tour, classée monument historique depuis 1879, fut restaurée seulement aux xxe et xxie siècles avec la rénovation du chemin de ronde, de la toiture et des deux étages abîmés. Actuellement ouverte au public, elle fait figure de musée retraçant son passé. Elle propose depuis 2008, une exposition permanente traitant de la migration vers la Nouvelle-France (Canada), afin de célébrer la fondation de la ville du Québec. De plus, est encore visible le cabestan de la chaîne, ce système tournant vertical permettant d’enrouler un câble à l’aide d’une force importante.

 

La tour de la Lanterne, un phare pas comme les autres

 

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Passons maintenant à la dernière actrice de cette triade défensive médiévale, la tour de la Lanterne qui fut bâtie après la tour de la Chaîne, au xve siècle. Son nom vient de sa tour vitrée où brûlait toutes les nuits une énorme bougie servant de boussole aux bateaux qui arrivaient au port. Haute de 75 m, elle domine tout le front de mer, ce qui en fait un véritable atout stratégique. On peut constater que son architecture contraste avec celle de ses deux sœurs. En effet, la tour est coiffée d’une flèche octogonale et de gargouilles au style gothique flamboyant dévoilant sa complexité et la minutie nécessaire à sa construction puis à ses rénovations futures. Lors des visites ouvertes au public, il est possible d’apercevoir des inscriptions laissées sur les murs par les détenus, datant essentiellement des xviie et xviiie siècles, affirmant sa forte orientation pénitentiaire. D’ailleurs, la flamme qui brûlait dans cette tour rappelait les nombreuses âmes perdues à cause d’actes sanguinaires ayant eu lieu en son sein au xvie, lui valant l’un de ses surnoms : tour des Prêtres. Classée monument historique en 1879, la tour est aussi ouverte au public qui peut déambuler parmi ses salles, ses dortoirs ou ses cellules.